Protection de l'eau potable : pour le respect du principe de précaution et pour un financement selon le principe du pollueur-payeur
La protection des eaux efficace et la gestion professionnelle des infrastructures, que nous avions jusqu’alors, garantissent une eau potable propre et un environnement sain, qui sont essentiels pour la qualité de vie de la population. Sachant que les villes et les communes sont directement concernées par les conséquences de la législation sur la protection des eaux, l'Union des villes suisses, avec sa section l’Association suisse Infrastructures communales et d’autres partenaires, se mobilise pour défendre le principe de précaution, essentiel à la protection de l'environnement.
L’eau, c’est la vie: un principe intangible
Diverses interventions déposées au Parlement pourraient avoir pour effet d’affaiblir la protection des eaux. Il s’agit notamment des motions 24.4589, 25.3154 et 25.3186, qui visent entre autres à aligner le monitoring des eaux suisses sur celui de l’UE. Ces interventions s’inscrivent dans la ligne de décisions prises par le Parlement dans le passé qui annulent des améliorations de la protection des eaux déjà actées: la motion 22.3795, demandant une révision à la baisse de l’objectif de réduction des pertes des éléments fertilisants, ainsi que les motions 22.3819, 22.4567 et 22.4569, qui visent à supprimer l’exigence des 3,5 % de surfaces de promotion de la biodiversité sur les terres ouvertes.
L’initiative parlementaire 22.441, «Une protection des plantes moderne, c’est possible», aurait également de fortes répercussions sur la pollution des eaux souterraines et de l’eau potable, car dans l’UE, le contrôle des homologations est lacunaire. Les procédures de contrôle et d’homologation actuelles entraînent déjà des dommages indirects, qui doivent être au bout du compte palliés aux frais des villes et des communes. C’est pourquoi l’Union des villes suisses se mobilise fortement avec ses partenaires en faveur de la motion 20.3052, «Abaissement des valeurs limites applicables aux pesticides. Financement des installations supplémentaires de traitement des eaux conforme au principe du pollueur-payeur», portée par Kurt Fluri, ancien conseiller national et ancien président de l’UVS. Ce complément à la réduction des apports en produits phytosanitaires correspond à une préoccupation majeure des villes.
Les dispositions légales existantes doivent impérativement être préservées, et les mesures du contre-projet informel aux initiatives sur l’eau potable de 2021 doivent être effectivement instaurées. Cela est nécessaire pour garantir l’approvisionnement à long terme en eau potable propre et pour protéger durablement l’environnement.
Faire payer les pollueurs: pour un financement équitable du traitement de l’eau potable
Pour les villes et les communes et les distributeurs d’eau municipaux, la production d’eau potable propre est aussi de plus en plus souvent un défi financier conséquent. Selon les estimations des associations professionnelles, les distributeurs d’eau vont devoir investir des millions pour pouvoir s’adapter à la baisse des valeurs limites dans le traitement de l’eau potable en construisant de nouvelles conduites de transport ou des stations d’épuration supplémentaires. La Confédération revoit régulièrement l’homologation des produits phytosanitaires (PPS) et fixe avec effet quasiment immédiat des valeurs seuils plus strictes dans le domaine de l’eau potable pour les produits en passe d’être interdits. On citera par exemple le fongicide chlorothalonil ou les PFAS (composés perfluoroalkylés et polyfluoroalkylés), dont les propriétés persistantes et la pertinence toxicologique entraîneront un renforcement des exigences en matière de traitement de l’eau.
Des mesures possibles pour assurer la protection impérativement nécessaire des ressources naturelles en eau potable ont été dégagées, entre autres par l’initiative parlementaire 19.475 et les nouvelles dispositions qui en découlent pour la protection des eaux. En revanche, le financement des mesures nécessaires en matière d’eau potable n’est abordé dans aucun de ces objets législatifs actuels. Or tant pour le financement de l’assainissement des sites contaminés (fonds OTAS) que pour le développement des stations d’épuration communales destinées à éliminer les composés traces organiques des eaux usées, la Confédération a, pour des situations de départ comparables, créé les bases juridiques nécessaires à des solutions de financement basées sur le principe pollueur-payeur. De l’avis de l’Union des villes suisses, cette approche devrait également être utilisée pour la future récupération du phosphore.
À cet égard, la responsabilité de l’approvisionnement en eau potable propre ne doit pas être laissée aux seuls cantons, villes et communes, car les défis ont de plus en plus souvent une dimension nationale. Les villes et les communes assument en outre la majeure partie des investissements nécessaires, souvent sans soutien financier suffisant. Pour faire face à ces défis de manière efficace et uniforme, il est nécessaire d’avoir un cadre clair et solidaire au niveau fédéral. C’est pourquoi l’Union des villes suisses se mobilise en faveur de la motion de Kurt Fluri mentionnée plus haut, afin qu’une solution de financement uniforme au niveau national et basée sur le principe de pollueur-payeur soit mise en place pour le financement du développement du traitement de l’eau potable, qui s’avèrera nécessaire ces prochaines années en raison de l’instauration de valeurs limites plus strictes pour les PPS, engrais et biocides.
La protection de l’eau potable est pour tous les échelons de l’Etat une tâche cruciale dont la portée écologique et financière ne cesse de croître. Pour garantir une bonne qualité de notre eau potable dans l’avenir, il faut appliquer avec rigueur le principe de précaution et se défendre avec détermination contre les tentatives politiques visant à affaiblir la protection des eaux. Pour autant, on ne doit pas reporter le financement des mesures nécessaires sur les seules villes et communes. Un financement conforme au principe de pollueur-payeur et uniforme au niveau national, comme le demande la motion de Kurt Fluri, est indispensable pour répartir équitablement les coûts environnementaux et assurer la crédibilité d’une politique durable de l’eau.