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La plus grande administration municipale de Suisse en télétravail: un défi et une chance

7 juilet 2021 – Durant la pandémie de coronavirus, la flexibilisation du monde du travail et la digitalisation de l’administration municipale ont connu une énorme accélération. Bien décidée à surfer sur cette vague, la Ville de Zurich est en train de remanier dans ce sens l’actuel règlement sur le travail mobile. Le télétravail doit devenir partie intégrante du nouveau monde du travail. Et avec l’introduction du «poste de travail de demain», la collaboration en ligne va devenir plus simple et plus efficace.

par le conseiller municipal Daniel Leupi, directeur du Département des finances de la Ville de Zurich

 

Une administration municipale employant quelque 30 000 salarié-e-s peut-elle fonctionner en télétravail?

Oui, elle le peut! La Ville de Zurich possède depuis déjà la mi-2018 un règlement sur le travail mobile. Une partie des employé-e-s télétravaillaient déjà avant la pandémie et en avaient retiré des expériences positives.

 

Naturellement, nous avions des atouts: beaucoup de services avaient déjà recours au mode de travail mobile, et l’infrastructure technique était déjà en place pour de nombreux collaborateurs et collaboratrices. Rétrospectivement, le passage au télétravail au printemps 2020 avec les règlements existants a bien fonctionné. C’est aussi ce que confirme une évaluation que nous avons effectuée parmi les cadres supérieurs: 84 % des personnes interrogées ont indiqué que le passage au télétravail avait bien fonctionné.

 

Nous n’avons pas été pour autant à l’abri (et moi pas plus que les autres) d’incidents ponctuels, comme le gel de la vidéo ou les pannes de son pendant les conférences. Cela peut être énervant ou amusant pendant quelques instants, selon le point de vue. Toujours est-il que cela n’a eu aucune répercussion sur les services fournis par l’administration municipale à la population, qui ont pu être maintenus pendant toute la durée de la pandémie.

 

De nombreux employé-e-s de la ville de Zurich travaillent en première ligne et n’ont pas pu passer en télétravail. Cela n’a-t-il pas généré et ne génère-t-il pas toujours un potentiel de conflit?

L’administration municipale de Zurich fournit des prestations dans un immense éventail incluant des secteurs extrêmement divers. Pour des raisons opérationnelles, tout le monde ne peut pas passer en télétravail. Ainsi, il n’était pas possible de déblayer les grandes quantités de neige tombées à l’hiver 2021 avec des drones, pas plus que la police municipale n’utilisait de robots lors des rassemblements. De même, il est difficile d’entretenir les massifs des jardins ou les arbres par Zoom. Le personnel de santé et de soin a été particulièrement mis à l’épreuve et a accompli justement pendant cette période difficile un travail remarquable sur le terrain.

 

Conscients de la nature hétérogène des professions, nous avons choisi de discuter et de communiquer en interne de manière active et transparente sur les questions sensibles en matière de droit du personnel et sur le plan opérationnel comme la manière de gérer la quarantaine ou la garde des enfants pendant la pandémie.

 

Je vois moins de potentiel de conflit en temps de fonctionnement normal. Le télétravail sera volontaire. Les employé-e-s des différentes professions savent si les processus permettent le télétravail ou non.

 

Les employé-e-s adorent le télétravail, leurs supérieurs moins...

Il faut avouer que l’encadrement à distance demande un certain temps d’adaptation, surtout parce que les échanges personnels sont moins directs et immédiats. Mais je n’accepte pas cela comme un argument valide contre le télétravail. Pour moi, l’encadrement repose sur la confiance mutuelle, la formulation claire des attentes et des objectifs, et sur le fait que l’on exige que ceux-ci soient réalisés – télétravail ou pas. Mon expérience a en outre montré que les employé-e-s ont été tout aussi performants en télétravail qu’au bureau.

 

Au cours des dernières semaines et des derniers mois, l’acceptation du télétravail a fortement augmenté. Il y a même des employés qui portaient auparavant un regard critique sur le télétravail et qui souhaitent à l’avenir effectuer une partie de leur travail à domicile.

 

Il est donc important que nous accompagnions et soutenions à la fois les cadres et les collaboratrices et collaborateurs dans ce processus de changement, que ce soit par le biais de formations internes à destination des différents groupes cibles, d’organes d’échange ou de modèles de meilleures pratiques.

 

Pourquoi la Ville de Zurich veut-elle continuer à encourager le télétravail?

Le travail mobile permet de concilier plus facilement le travail, la famille et les loisirs et augmente l’attractivité de l’employeur. Le début et la fin de la journée de travail peuvent être mieux adaptés aux horaires des cours scolaires et aux heures d’ouverture des autres structures d’accueil des enfants telles que les crèches ou les garderies.

 

Une plus grande co-détermination dans le choix du lieu de travail approprié peut favoriser la concentration et le calme dans le déroulement de la journée.

 

En outre, diverses études montrent que l’augmentation du travail à domicile recèle un grand potentiel de réduction des émissions de CO2 et du trafic de pendulaires aux heures de pointe. La Ville de Zurich apporte ainsi une contribution à ses objectifs climatiques.

 

Comment la Ville de Zurich imagine-t-elle le travail de demain?

À mes yeux, il est déjà évident que la façon dont nous collaborerons ne sera plus celle d’avant la pandémie de coronavirus. Le télétravail et le travail mobile deviendront partie intégrante de nos conditions d’embauche. C'est pourquoi nous remanions actuellement le règlement existant sur le travail mobile.

 

La compétence d’autoriser le travail mobile restera entre les mains des cheffes et chefs de service, qui pourront désormais la déléguer à un service désigné par leurs soins. La décision de travailler en mobilité devrait ainsi être une décision facilement accessible qui pourra être prise en accord avec les supérieurs directs de l’employé-e.

 

Si des employés souhaitent effectuer une partie de leur travail à domicile et que leur activité est adaptée au travail mobile, la demande sera à l’avenir acceptée. Le travail mobile ne servant pas toujours les intérêts de l’entreprise, les salariés n’auront toutefois pas de droit absolu en la matière. À mon avis, le volontariat est un élément crucial. En temps de fonctionnement normal, personne n’est obligé de télétravailler. Le travail mobile complètera le travail sur le lieu de travail habituel, mais il ne le remplacera pas.

 

Ces dernières semaines, on m’a souvent demandé quelle était la bonne proportion entre travail au bureau et télétravail. Nous n’apporterons pas de réponse définitive à cette question dans le nouveau règlement. Nous nous abstenons délibérément de formuler un objectif fixe quant à la part de travail au bureau ou de télétravail. Cette question est en premier lieu laissée à l’appréciation de l’autorité directement compétente pour l’embauche dans les différents services et organisations. À ce niveau, il est également nécessaire de clarifier la manière dont traiter les questions telles que les réunions hybrides, le télétravail et le travail à temps partiel, la protection de la santé, le respect des pauses ou des créneaux de joignabilité.

 

S’il y a davantage de télétravail, la Ville de Zurich ne risque-t-elle pas de se retrouver avec beaucoup de bureaux administratifs vides sur les bras?

Selon le concept de gestion des bureaux d’Immobilien Stadt Zürich, il est prévu que tous les employé-e-s puissent continuer à utiliser un poste de travail municipal. Il peut aussi s’agir d’un poste de travail non personnel utilisé de manière flexible par plusieurs personnes. Il est également possible que des tables soient enlevées pour aménager davantage d’espaces communs, car les employé-e-s se retrouveront alors davantage au bureau pour des échanges et des réunions, tandis qu’ils effectueront plutôt les activités conceptuelles ou concentrées à domicile.

 

Comme nous n’en sommes qu’au premier stade de l’établissement du télétravail, nous suivrons dans l’avenir cette question de près et initierons à un stade précoce les mesures nécessaires, comme les réaffectations de locaux de bureaux appartenant à la Ville ou la résiliation de baux conclus par la Ville avec des propriétaires externes. De même, la Ville de Zurich est impliquée depuis un certain temps dans l’initiative Work Smart et bénéficie ainsi du transfert de savoir-faire.

 

De combien de numérique le télétravail a-t-il besoin?

Depuis plusieurs années, la Ville de Zurich mène des projets de digitalisation dans les domaines les plus divers. À cette fin, elle a adopté fin 2018 une stratégie de smart city, que trois des six points forts actuels viennent soutenir par des projets concrets. Par exemple, avec «Mein Konto» (Mon compte), le portail réunissant tous les services en ligne de la ville de Zurich. Celui-ci a récemment franchi la barre des 100 000 utilisateurs, et la tendance à la hausse se poursuit.

 

Le «poste de travail de demain» utilise les éléments technologiques les plus modernes. Désormais, tous les employé-e-s accèderont aussi aux applications par leur smartphone. Nous intégrerons ainsi tous les collaborateurs et collaboratrices sans bureau fixe dans notre infrastructure numérique, ce qui simplifiera la collaboration et la rendra plus efficace.

 

Le télétravail et les nouveaux univers de travail transformeront-ils la ville?

La Ville de Zurich aborde l’avenir avec beaucoup d’enthousiasme. Les univers de travail vont évoluer très rapidement. Cela aura des répercussions, tant pour la Ville de Zurich en tant qu’employeur que pour la ville en tant que site économique. Il est à l’heure actuelle encore difficile d’évaluer ce que cela signifie précisément pour l’évolution des espaces de bureaux, le nombre d’emplois ou par exemple le secteur de la restauration, car de nombreuses entreprises commencent seulement à se pencher concrètement sur la mise en œuvre du télétravail après la pandémie.

 

«Après le covid: les voix des villes» paraît chaque mercredi. Cette série est l’occasion pour des experts de différents domaines de prendre position sur les thèmes les plus brûlants de l’actualité du point de vue des villes (s'abonnner).

 

Daniel Leupi est conseiller municipal et directeur du Département des finances de la Ville de Zurich.

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